samedi 12 décembre 2009

La rue-corridor vs. l'espace libre

Comme définit précédemment lors de mes recherches, la rue-corridor est étroite et linéaire. Avec l'arrivée de la voiture, elle tend à perdre sa qualité d'espace public; le piéton ne peut plus s'approprier la rue comme un lieu d'échange et de rencontre. Néanmoins, la rue-corridor a par sa forme la capacité à tisser un réseau clair et articulé qui structure la ville. C'est le cas de Rio de Janeiro, où la rue-corridor est proéminente. Cependant, il est nécessaire de réinviter l'espace publique dans la ville. Rio de Janeiro a alors subi nombre de changements urbains, dont un exemplaire : la création de l'avenue President Vargas en 1944.


Plan de rues avec élévations, Rio de Janeiro en 1874



Rio de Janeiro, au début du 20è siècle
Le plan urbain est basée sur une trame de rues-corridors.



Rio de Janeiro, après la création de l'avenue President Vargas, 1944 
 L'avenue offre un large espace publique.

Source : "The Journal of Decorative and Propaganda Arts", Vol. 21, Brazil Theme Issue (1995), Rachel Sisson and Elizabeth A. Jackson


Mais au 20è siècle, l'architecte moderne a peu à peu commencé à abandonner la rue-corridor (cf. "Il faut tuer la rue-corridor") pour se diriger vers un urbanisme où la masse des ilôts se désagrège, où l'on occupe plus tout l'espace délimité par l'ilôt. Au contraire, il s'agit plutôt de travailler dans un espace libre; on pose des objets, des architectures, sur un plateau vide (qui est l'espace public). Un exemple far et éclairant est celui de la ville radieuse imaginée par le Corbusier. Néanmoins, la destruction de la rue-corridor anéantit dans le même temps la structure de la villes; les façades se multiplient et perdent leur rapport qui était si clair avec la rue-corridor. L'espace public est néanmoins beaucoup plus généreux, mais peut-être trop.
 

Maquette 3D de la ville radieuse imaginée par le Corbusier


Il est alors intéressant d'observer des cas de compromis entre les deux, comme par exemple le ministère de l'éducation et de la santé à Rio de Janeiro par Lucio Costa et Oscar Niemeyer, avec la collaboration du Corbusier. L'édifice a pour particularité d'être totalement traversable au rez-de-chaussée. Le sol est donc extérieur et accessible au piéton; le sol devient public. Alors que la ville est essentiellement composée de rues-corridors, le bâtiment vient alors créer l'événement. S'il n'y avait que des rues-corridors, le piéton serait aliéné, forcé de poursuivre un tracé linaire sans pouvoir à aucun moment s'en échapper. Le dispositif du bâtiment permet alors d'offrir un espace public urbain qui répond à la ville entière.


Esquisse de le Corbusier, Ministère de l'éducation et de la santé, Rio de Janeiro



Ministère de l'éducation et de la santé, Rio de Janeiro


Source : "Lessons for students in architecture", Herman Hertzberger, éditions 010 Publishers, 1991


Un autre exemple intéressant est celui du Centraal Beheer à Appeldoorn par Herman Hertzberger. Le bâtiment n'occupe pas pleinement l'espace définit par le parcellaire de l'îlot, les façades sont dentelées et offrent des passages qui traversent et donnent accès à l'intérieur du bâtiment. Il est alors possible de vivre à l'intérieur du bâtiment, comme s'il s'agissait d'une ville. Ces couloirs sont ce que j'appellerai des corridors-rues.


Plan du Centraal Beheer par Herman Hertzberger, Appeldoorn


 
Centraal Beheer, Appeldoorn

Source : "Lessons for students in architecture", Herman Hertzberger, éditions 010 Publishers, 1991



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